lundi, mars 26, 2007

L’INDEPENDANT DU DIMANCHE 25 MARS 2007-03-26

CARCASSONNE


Mort d’Amélie Birembaux : les peines des deux médecins annulées
La décision du conseil national de l’ordre des médecins est tombée hier. Les peines des docteurs Cohen et Gounelle qui avaient été condamnés à deux mois d’interdiction de pratiquer la médecine (douze mois dont dix avec sursis) par le conseil de l’ordre de Montpellier sont annulées. Ils avaient été sanctionnés par leurs pairs après le décès de la jeune Amélie Birembaux, victime d’une hémorragie fatale à la suite d’une opération de l’appendicite en septembre 2004. Dans le rendu du jugement, la section disciplinaire du conseil national de l’ordre des médecins estime, en effet, que le « docteur Gounelle n’a laissé sa patiente ni sans assistance, ni sans soins nécessaires, qu’il lui a prodigué des soins attentifs et dévoués, que les soins délivrés par le docteur Gounelle ont été conformes aux règles de l’art et aux données acquises de la science ».
En ce qui concerne le docteur Cohen, le conseil estime qu’il avait utilisé la technique de la coeliochirurgie « avec l’accord du père de la patiente, qu’il a assuré un suivi post-opératoire des plus diligents, que la situation clinique de la patiente semblait alors parfaitement compatible avec son transfert vers le CHU où elle pouvait être opérée dans les meilleures conditions de sécurité ».
Une décision qui anéantit les parents de la petite Amélie. « Le conseil de l’ordre de Paris n’a absolument pas tenu compte des pièces (un rapport de l’ARH et une contre-expertise judiciaire notamment, NDLR) que nous avonsfournies », se désolait hier Xavier Birembaux. « C’est une institution corporatiste qui pratique l’abus de pouvoir au détriment du droit du malade », dénonce-t-il. Il a déjà décidé de se pourvoir en cassation et de saisir les juridictions européennes. « Le débat sur le conseil de l’ordre doit être relancé. Au nom de la justice, j’irai jusqu’au bout. Je ne me bats pas seulement pour Amélie mais pour défendre les droits des malades. Quant on a, comme nous, perdu un enfant, le temps s’arrête. Je consacrerai ma vie à cette cause ».
E.D.

LA DEPECHE DU MIDI DU 26 MARS 2007

CARCASSONNE


Le fait du jour. Condamnés à l’interdiction d’exercer pendant deux mois après la mort d’Amélie Birembaux par le conseil régional de l’ordre.

Les Dr Cohen et Gounelle blanchis par leurs pairs

Sept mois après avoir été condamnés par le conseil régional de l’ordre des médecins à douze mois (dont dix avec sursis) d’interdiction d’exercer, le chirurgien Patrick cohen et l’anesthésiste Jean-pierre Gounelle viennent d’être blanchis par le Conseil national de l’ordre. La justice ordinale vient, comme l’avait fait la justice pénale, de clore ou presque le douloureux dossier de l’affaire Amélie Birembaux. Les juges du conseil national de l’ordre ont donc eu la même interprétation que les magistrats du tribunal correctionnel de Toulouse, qui, le 29 mars dernier, avait relaxé les trois médecins de la qualification d’homicide involontaire. A l’époque, les juges avaient estimés que les trois médecins n’avaient pas commis de faute grave, à tout le moins « une erreur de diagnostic » pour le Dr Cohen. En ce qui concerne l’anesthésiste, les magistrats avaient souligné que « la seule faute qui peut être imputée au Dr Gounelle est d’avoir sous-estimé la situation de sa patiente », mais là encore pas de « faute caractérisée au sens du code pénal ». Quant à la responsabilité du Dr Bernier, elle avait été évacuée. Certes, ce dernier a bien commis une erreur « lors de la lecture initiale du scanner, laquelle aurait pu être qualifiée de faute caractérisée s’il s’était contenté de cette première lecture […] il constate le problème et alerte immédiatement les autres médecins. »
L’instance ordinale, a eu, peu ou prou, la même lecture du dossier. « Le docteur Gounelle a suivi sans discontinuer l’intervention pratiquée sur l’enfant […], tout au long de la journée il a assuré les soins requis par l’état de l’enfant et il a pris toutes les dispositions utiles dans l’organisationdu transport », a mentionné le Conseil de l’ordre dans ses attendus. Idem pour le docteur Cohen, « qui a assuré un suivi post-opératoires des plus diligents », dit la section disciplinaire du conseil national de l’ordre.
Au-delà de cette décision que Xavier Birembaux s’apprête à déférer devant la cour de cassation (voir ci-dessous), seul le docteur Jacques Bernier, le radiologue de la clinique, reste le seul « condamné » de l’affaire Birembaux. Le conseil régional de l’ordre l’avait simplement sanctionné. En décidant, de ne pas faire appel, le docteur Bernier, s’est privé d’une réhabilitation auprès de ses pairs

Le 3 septembre 2004, Amélie entre dans le bloc
Le 3 septembre 2004, Amélie Birembaux, 9 ans, entre dans une des salles d’opération de la clinique Montréal de Carcassonne pour y subir une appendicectomie. L’intervention lui sera fatale. Transférée en début de soirée aux urgences de l’hôpital Purpan, l’enfant meurt peu après minuit, le 4 septembre, des suites d’une hémorragie. Quelques mois plus tard, sur la base d’une expertise, Xavier Birembaux, le père de la petite Amélie, médecin pédiatre exerçant lui aussi dans l’établissement privé, assigne trois de ses confrères devant le tribunal correctionnel de Toulouse.
Les experts nommés par la justice avaient mis en évidence une succession d’approximations suivies d’un mauvais diagnostic. Un enchaînement fatal. Dès le début de l’intervention,la chirurgien a perforé l’artère iliaque de l’enfant, provoquant une hémorragie importante. En milieu d’après-midi, face à l’importance de l’hémorragie, un scanner est pratiqué. Mais le diagnostic du radiologue, Jacques Bernier, tarde. Ce n’est que vers 18h30 qu’est découvert « un épanchement intra-abdominal ». En début de soirée, alors que l’état de l’enfant se dégrade, les médecins prennent la décision de la faire transporter jusqu’à Toulouse, où la petite fille décédera quelques heures plus tard.

Réactions : Xavier Birembaux toujours plus déterminé
« C’est un déni de justice »
Une nouvelle fois, la justice vient de débouter les époux Birembaux. Installé depuis la disparition d’Amélie en Guadeloupe, le docteur Birembaux reste plus que jamais déterminé à poursuivre le combat. Et c’est avec stupéfaction, samedi, qu’il a pris connaissance des attendus du Conseil national de l’ordre des médecins. « Comme au pénal, rien n’a été retenu, regrette le pédiatre. C’est un déni de justice. Devant le Conseil régional de l’ordre, nous avions apporté toutes les preuves que les médecins qui ont opéré ma fille n’avaient pas respecté la déontologie médicale. Notre dossier était béton. Même l’ARH, dans un rapport, avait estimé que l’un des médecins usait de pratiques déconseillées sur les enfants ».
Xavier Birembaux a déjà pris sa décision. Il ira devant la Cour de cassation et la Cour européenne, si nécessaire. Pour être enfin reconnu en sa qualité de victime. « Comment le Conseil national de l’ordre n’a-t-il rien pu retenir ? », s’étonnait hier en fin de journée le docteur Birembaux.
« On a l’impression que l’on donne aujourd’hui une impunité totale aux médecins ». Et de s’interroger : « Je me demande si le Conseil de l’ordre défend les médecins ou les intérêts du malade. Une chose est sûre : j’attends des explications ».

MIDI-LIBRE DU 26 MARS 2007

CARCASSONNE
Justice Affaire Birembaux : les médecins « blanchis »

Rappel :
Les médecins de la clinique Montréal ayant participé à l’opération d’Amélie, décédée à l’hôpital de Purpan le 3 septembre 2004, avaient été sanctionnés par le conseil régional de l’ordre des médecins.

Examiné le 1er mars par la section disciplinaire du conseil national de l’ordre des médecins, l’appel des Dr Cohen et Gounelle a débouché sur l’annulation des peines d’interdiction d’exercer la médecine.
En septembre 2006, le conseil du Languedoc-Roussillon avait infligé douze mois d’interdiction d’exercice (dont dix avec sursis) au chirurgien et à l’anesthésiste, le radiologue le Dr Bernier écopant d’un avertissement. Des décisions prises quelques mois après un jugement pénal favorable aux médecins (*).
L’instance supérieure du conseil a choisi de nier le jugement qui estimait que les médecins n’avaient pas respecter l’obligation de « donner des soins consciencieux, attentifs et, réserve faite des circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la science ». La section disciplinaire a ainsi estimé que le Dr Cohen avait utilisé la technique de la coeliochirurgie « avec l’accord du père de la patiente, qu’il a assuré un suivi postopératoire des plus diligents, que la situation clinique de la patiente semblait alors parfaitement compatible avec son transfert vers le CHU ». Absolution aussi pour le Dr Gounelle, « qui n’a laissé sa patiente ni sans assistance ni sans soins nécessaires, qu’il lui a prodigué des soins attentifs et dévoués ».
Une décision incompréhensible pour le Dr Birembaux, qui devrait faire valoir son droit d’appel devant le Conseil d’Etat. Logique démarche quand le père d’Amélie, dans un courrier adressé au président de la section disciplinaire avant le procès ordinal, espérait que les médecins « puissent être jugés et condamnés pour leur comportement non déontologique, pour avoir trahi le serment d’Hippocrate. Ils nous ont trompés, ils nous ont trahis et notre fille est morte ».

(*) Le procès, le 1er février 2006 à Toulouse, avait été suivi d’un jugement, le 29 mars suivant, déboutant les époux Birembaux de l’action engagée devant la justice pénale, en estimant qu’aucun des trois hommes en cause n’avait commis de « faute grave et caractérisée ».