mercredi, octobre 04, 2006

Mort d’Amélie: les trois médecins sanctionnés par leurs pairs
L'INDEPENDANT Samedi 30 septembre 2006

Deux mois d’interdiction d’exercer (douze dont dix avec sursis), pour le chirurgien Patrick Cohen et l’anesthéstiste Jean-Pierre Gounelle, un avertissement pour le radiologue Christian Bernier: telle est la sanction de l’ordre des médecins.

Blanchis totalement par la justice pénale en mars dernier, les trois médecins ayant participé à l’opération d’Amélie Birembaux, en septembre2004 à la clinique Montréal de Carcassonne, viennent d’être sanctionnés par leurs pairs. Le Conseil régional de l’ordre des médecins, habilité à prononcer des peines pour les manquements à la déontologie médicale, a décidé d’interdire l’exercice de la médecine pendant deux mois (douze mois dont dix avec sursis) au chirurgien Patrick Cohen et à l’anesthésiste Jean-Pierre Gounelle. Il a infligé un avertissement au radiologue Christian Bernier.
Obligation de moyens
La plainte au conseil de l’ordre avait été déposée le 10juin 2005 par les parents d’Amélie, Caroline et Xavier Birembaux, au lendemain de la publication d’un rapport d’expertise judiciaire accablant pour les trois médecins en cause. Mais la justice ordinale avait préféré, pour instruire à son tour ce dossier, attendre l’issue du procès pénal intenté par la famille de la fillette. Et c’est donc le 8juillet dernier, trois mois et demi après la relaxe prononcée par le tribunal correctionnel de Toulouse (L’Indépendant du 27mars 2006) que le Conseil régional de l’ordre a examiné l’affaire. La décision n’a été rendue publique, par affichage, que le 19septembre dernier.
Pénalement, la justice avait reconnu qu’aucun des trois hommes n’avait commis de "faute grave et caractérisée" durant cette triste journée du 3septembre. Le conseil de l’ordre, lui, a estimé que les trois médecins, à des degrés divers, n’avaient pas respecté l’obligation de moyens qui leur est faite par leur code de déontologie: donner des soins "consciencieux, attentifs et, réserve faite de circonstances exceptionnelles, conformes auxdonnées acquises (ou actuelles) de la science".

Concernant le docteur Cohen, le conseil de l’ordre considère qu’il "n’avait pas à se préoccuper des dires de l’entourage, et devait prendre ses responsabilités", et réopérer sans tarder Amélie, vers 18h30, dès que son état réel a été découvert, soit plus de dix heures après la première opération lors de laquelle le chirurgien avait perforé sans s’en rendre compte une artère importante.
Concernant le docteur Gounelle, l’ordre estime "qu’il n’a pas totalement assumé sa responsabilité car c’est à lui qu’incombaient la lecture et l’interprétation des signes cliniques présentés par l’enfant". Il lui est également reproché d’avoir fait partie de ceux qui ont déconseillé au docteur Cohen de réopérer l’enfant sur place et de l’envoyer plutôt à Toulouse.
Enfin, concernant le docteur Bernier, l’ordre a estimé qu’il aurait dû effectuer plus vite une lecture du scanner – pratiqué à 15h30 mais réellement interprété à 18h – qui indiquait la présence d’une hémorragie interne importante.
Les médecins ont un mois pour faire appel de la décision devant le conseil national de l’ordre.

L.R.