jeudi, mai 24, 2007

Minute n° 2307 DU 9 MAI 2007 (II)

La clinique se fout-elle de la charité ?

Lorsque le drame est survenu, en septembre 2004, il y avait une passation de pouvoir à la clinique Montréal entre l’ancien directeur, Olivier Debay, et son successeur désigné, Denis Baudinaud. Le papa d’Amélie, Xavier Birembaux, estime que les deux hommes auraient dû ordonner une enquête interne afin de comprendre dans quelles conditions la fillette était décédée. Pourquoi n’y en a-t-il pas eu ?
« Minute » a tenté de joindre l’actuel directeur, Denis Baudinaud. Mais l’homme étant très occupé, c’est sa collaboratrice, Véronique Molière, qui a accepté de nous répondre : « Dans ce cas de situation, c’est l’ARH, l’Agence régionale de l’hospitalisation, sous la tutelle directe du ministère de la Santé, qui a diligenté une enquête au sein de l’établissement, une enquête sur la sécurité anesthésique et sur les pratiques opératoires. Cette enquête de l’ARH n’a révélé aucune anomalie du point de vue de l’établissement. »
Oui, mais bon, il y a quand même eu la mort d’une enfant ? « Les médecins qui exercent à la clinique sont des praticiens libéraux, donc il y a une vraie séparation : il y a d’un côté les praticiens libéraux et de l’autre l’établissement, qui leur fournit un outil de travail. Les problèmes juridiques, cela concerne le chirurgien et l’anesthésiste, ça n’a plus rien à voir avec l’établissement lui-même, cela n’engage pas la responsabilité de la clinique. »
Si on lit les conclusions du rapport de l’ARH, tout cela est moins évident. Si ce rapport souligne effectivement que, depuis la mort d’Amélie, le chirurgien a changé de mode opératoire et suit désormais à la lettre les recommandations de la Haute Autorité de Santé (qu’il a ignorées durant huit ans !), il mentionne toutefois que « l’établissement ne dispose pas de la totalité du matériel préconisé par les recommandations publiées en septembre 2000. » Et quoi qu’il en soit, une clinique n’est pas un simple « outil de travail », ses responsables doivent s’assurer de la compétence des praticiens libéraux qui viennent y exercer.
Est-ce que le chirurgien et l’anesthésiste impliqués dans la mort d’Amélie sont toujours en fonction à la clinique ? Réponse embarrassée de Véronique Molière : « Heu, oui, j’ai un doute, mais je pense que oui. »
Nous avons également décidé de contacter l’ex-directeur, Olivier Debay, ancien directeur départemental du Medef, président du syndicat régional de la fédération hospitalière privée et vice-président de la Haute Autorité de Santé au moment des faits. Bref un notable. Il était malheureusement injoignable, mais nous avons pu converser avec sa compagne, qui, dans un premier temps, nous a pris de haut : « Vous savez, l’affaire a été jugée, le conseil de l’ordre a tranché. De toute façon, il est fou le père Birembaux. » Fou, le père d’une gamine de 9 ans morte suite à une opération qui a mal tourné ? Indignation de notre journaliste : « Madame, les propos que vous tenez sont scandaleux ! » Notre interlocutrice met alors la pédale douce : « Attendez, laissez-moi finir, vous avez mal compris, je voulais dire fou de douleur, c’est terrible ce qu’il lui est arrivé. C’est affreux mais bon. Ce que vous pouvez faire, c’est appeler le directeur de la clinique Montréal. » C’était déjà fait, madame.
Pierre Tanger